
Deux nouvelles propositions de loi entendent permettre à la mère d’accoucher dans la discrétion, c’est-à-dire sans que son nom ne soit inscrit dans l’acte de naissance.
Ce n’est pas la première fois que de telles propositions arrivent à la Chambre.
Les deux nouvelles propositions de loi - déposées respectivement fin décembre 2024 et début janvier 2025 à la Chambre – reprennent en les modifiant celles qui avaient été déposées sous la précédente législature.
La situation actuelle : la femme qui accouche est automatiquement la mère et est désignée comme telle dans l’acte de naissance, ce qui établit la filiation (article 312 de l’ancien Code civil). La mère biologique étant toujours mentionnée dans l’acte de naissance, l’accouchement discret ou anonyme est impossible, et l’enfant ou son tuteur peut toujours retrouver aisément l’identité de la mère biologique.
Première proposition (Proposition de loi relative à l'accouchement dans la discrétion)
L’objectif est de dégager une solution qui permette de protéger conjointement la mère et l’enfant en prévoyant la possibilité pour la mère d’accoucher dans la discrétion tout en préservant la possibilité pour l’enfant de naître dans de bonnes conditions et de pouvoir retrouver ses racines.
Les auteurs de cette proposition sont en faveur d’un accouchement dans la discrétion, où les données relatives à la mère (et éventuellement au père ou à la coparente) seraient conservées et tenues secrètes, mais seraient toutefois accessibles à l’enfant dans certaines conditions.
Le père biologique ou la coparente pourrait établir un lien de filiation via la procédure de reconnaissance mais il/elle ne pourrait pas s’opposer à l’accouchement dans la discrétion.
Après un délai de de réflexion de deux mois durant lequel la mère pourrait se rétracter et établir un lien de filiation avec l’enfant, ce dernier serait adoptable. Mais en cas de rétractation, la filiation maternelle serait établie et l’acte de naissance remplacé.
Les données concernant l’accouchement seraient conservées dans un registre, de manière sécurisée. Le registre serait tenu auprès du tribunal de la famille.
L’enfant pourrait avoir accès aux informations sur ses origines biologiques, en ce compris l’identité de sa mère (et, si possible, de son père ou de sa coparente), lorsqu’il atteint l’âge de douze ans. Les parents biologiques seraient informés de la demande d’accès aux données par l’enfant, et auraient la possibilité de s’opposer à la divulgation de l’information relative à leur identité dans un délai d’un mois, à partir de la notification de la demande, auprès du tribunal de la famille. Le juge devrait alors statuer sur la base des intérêts en présence et pourrait déterminer si des données sont transmises à l’enfant et, le cas échéant, lesquelles. Passé le délai d’un mois, les autorités compétentes en matière d’adoption pourraient divulguer les informations à l’enfant.
Seconde proposition (Proposition de loi modifiant le Code civil et le Code judiciaire en vue de permettre l'accouchement discret)
Ici aussi, il ne s’agit pas de permettre l’accouchement « sous X », purement anonyme, dans le cadre duquel l’identité de la mère biologique restera secrète à tout jamais.
L’officier de l’état civil, auprès duquel la naissance doit toujours être déclarée par les parents ou par l’hôpital concerné, serait tenu au secret professionnel, et ne pourrait pas communiquer l’identité de la mère au Registre national. L’acte de naissance serait établi sans mentionner les données de filiation.
Pour distinguer cette procédure de l’accouchement purement anonyme, il est prévu que l’officier de l’état civil communique ensuite les données à caractère personnel concernant le(s) parent(s) biologique(s) à l’autorité centrale fédérale visée à l’article 360-1, 2°, de l’ancien Code civil. Cet organe indépendant, qui doit encore être créé :
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- conserverait ces données en lieu sûr,
- procurerait un accompagnement psychologique à la mère biologique et
- ferait office de médiateur entre les différentes parties pour le cas où l’enfant exprimerait ultérieurement le désir d’en savoir plus sur son ou ses parent(s) biologique(s) ou d’être mis en contact avec eux.
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Pour préserver l’anonymat de la mère :
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- elle serait représentée, tout au long de la procédure d’adoption, par un service d’adoption interne,
- elle seule (donc pas le père) devrait consentir à l’adoption discrète et
- le juge ne pourrait en aucun cas chercher à recueillir des informations dans l’environnement social de la mère.
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La demande d’ouverture de la procédure d’adoption discrète devrait être formulée par la mère biologique avant la sortie de l’hôpital. Ensuite, la procédure d’adoption pourrait être lancée immédiatement après la sortie de l’hôpital, de manière à ce que le suivi médical nécessaire puisse être garanti. Le délai au cours duquel la femme pourrait retirer son consentement à l’adoption ou au cours duquel d’autres parties ayant un intérêt pourraient faire opposition serait limité à trois mois à compter de la date de sortie de l’hôpital.
L’autorité centrale fédérale serait responsable de la communication des informations sur la mère et éventuellement sur le père ou la coparente à l’enfant ou à un éventuel descendant qui en fait la demande. La communication de ces informations se ferait aux conditions suivantes :
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- l’enfant ou un éventuel descendant devrait être majeur; mais un mineur qui démontre une capacité de discernement pourrait également demander ces informations;
- l’autorité centrale fédérale informerait la mère et, éventuellement, le père ou la coparente, de la requête de l’enfant ou d’un éventuel descendant d’accéder aux données de filiation;
- la mère et, éventuellement, le père ou la coparente pourraient s’opposer à cette requête en introduisant, dans le mois qui suit la notification par l’autorité fédérale centrale, un recours auprès de cette dernière.
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Ces deux propositions n’ont pas encore été débattues. Reste à voir si elles rencontreront plus de soutien que les précédentes…